Élections départementales : tout comprendre du scrutin et de ses enjeux

Les 20 et 27 juin, les départements renouvellent leur assemblée et leur président. Retrouvez tous les candidats de votre canton, alors que le scrutin peine à se faire connaître

Ils étaient voués à disparaître, pris en tenaille entre les régions à leur gauche et les intercommunalités à leur droite. Mais les départements sont encore là et renouvellent leur assemblée les 20 et 27 juin.

Les électeurs des Bouches-du-Rhône, du Vaucluse et des Alpes-de-Haute-Provence sont appelés aux urnes pour élire leurs conseillers départementaux, dans l'indifférence générale, ou presque. “On est à l’heure d’une reconfiguration du territoire qui fait que l’on a du mal à se représenter l'intérêt du département, analyse Christèle Lagier, maître de conférences en science politique à Sciences Po Aix. Ce sont des élections qui auraient dû disparaître et qui sont finalement maintenues pour un échelon qui n’a pas beaucoup de sens.. De plus, on a articulé cette élection autour d’un binôme, donc on a l’impression d’élire deux personnes pour un échelon qui n’a pas beaucoup de sens. Tout cela fait que les électeurs ont un peu de mal à s’y retrouver.

C’est peu dire que le système électoral est complexe. Les élections départementales sont construites autour de cantons, qui ont un périmètre différent des communes, communautés d'agglomération ou des circonscriptions. Les candidats se présentent par duo mixte et les deux élus deviennent conseillers départementaux pour élire ensuite leur président.

D'importantes compétences dans l'action sociale

Si ce système de cantons, le plus vieux découpage territorial, n’a d’intérêt que lors des élections, le Département conserve aujourd’hui d’importantes compétences dans la vie des citoyens. “La loi Notre* a pu donner l’impression que les Départements étaient moins importants qu’avant car on leur a enlevé un certain nombre de compétences, dont l’économie, analyse Jules Nyssen, délégué général de Régions de France. Mais c’est une collectivité essentielle. Elle s’occupe des collèges, des routes et elle met en œuvre toute l’action sociale vis à vis des mineurs, des personnes dépendantes, des minimums sociaux avec le RSA et la politique d’insertion. Elle s’occupe aussi de santé avec les Ehpad…” 

Et pourtant, on ne trouve que très peu d'annonces sur la future politique menée par les candidats. “Il n’y a pas de programme électoral au niveau des départements, déplore Jacques Boulesteix, astrophysicien et spécialiste des collectivités territoriales. On ne voit rien du tout. On voit Martine Vassal dans les Bouches-du-Rhône nous dire ‘Je vais continuer à aider les communes et les collèges.’” Ce dernier estime d’ailleurs que la question de la “fusion” entre le Conseil départemental et la Métropole Aix-Marseille - sur laquelle il a travaillé au moment de son élaboration -, abandonnée par l'État en 2018 ,“reviendra sur la table”.

Dans les Alpes-de-Haute-Provence et le Vaucluse, les problématiques sont un peu différentes et l’ombre d’une métropole qui viendrait les absorber est plus lointaine. Le premier devra bientôt réinventer son modèle économique, écologique et touristique face au réchauffement climatique. Le second, affronte un taux de chômage qui est l’un des plus importants du pays et de fortes inégalités sociales. 

Alerte abstention

Ce n’est pas ça qui conduira forcément les électeurs aux urnes. Si la tendance est observée dans toutes les élections locales, l’abstention est encore plus forte lors des élections départementales, à près de 50% lors des deux tours en 2015. "Il y a un déficit de popularité. Les gens ne connaissant pas leur conseillers et le président du conseil départemental, rappelle Jacques Boulesteix, ils connaissent le président de la République, quelques ministres, leur maire et éventuellement un adjoint de la compétence qui les concerne, l'école ou le sport."

Et tout ça ne les pousse évidemment pas aux urnes. Les bureaux de vote pourraient s'annoncer encore plus clairsemés à l'aube du cru 2021. "Le fait que les élections soient groupées est plutôt un avantage", estime Christèle Lagier, qui parie ainsi sur un intérêt un peu plus conséquent sur les élections régionales, qui pourrait amener les électeurs à se retourner, à y être, vers le bureau d'en face. Encore faudra-t-il que les Régionales les attire davantage.

Gillian Fléqué

*Loi de décentralisation promulguée en 2015, portant sur la nouvelle organisation territoriale de la République et définissant notamment le périmètre et les compétences des 13 grandes régions.


Bouches-du-Rhône : Vassal veut rempiler sans candidat face à elle

Les 20 et 27 juin, on votera élire le ou la président(e) du Conseil départemental des Bouches-du-Rhône. Un scrutin passé quelque peu sous les radars ces dernières semaines, écrasé par le feuilleton des élections régionales. La sortante Les Républicains, Martine Vassal, est donc candidate à sa succession, six ans après avoir battu l'ancien socialiste Jean-Noël Guérini.

Face à qui ? C'est la grande inconnue. La gauche, qui a soldé son passé guériniste et entend surfer sur la vague du Printemps marseillais, a réussi à faire l'union dans les 29 cantons, sans toutefois désigner de leader pour aller défier l'élue marseillaise.

Idem au RN, qui se concentre davantage sur les régionales. Le résultat apparaît incertain : en 2015, la majorité s'était jouée à deux cantons près pour Martine Vassal.

Ce scrutin, alors que la crise sanitaire s'estompe tout juste, risque surtout d'être marqué par l'abstention. Et dans ce cas de figure, seuls les deux premiers de chaque canton seront qualifiés pour le 2e tour. Dans presque tous les cas, l'un des deux sera le RN (il était arrivé en tête dans 28 des 29 cantons en 2015). Au 1er tour, à gauche comme à droite, l'enjeu sera d'arriver deuxième dans le maximum de cantons; Pour espérer, ensuite, un front républicain victorieux.

Sylvain Pignol

L'assemblée actuelle

Vaucluse : toujours en quête d’une majorité introuvable

En Vaucluse, il y a au moins une chose de sûre. Lors de la prochaine mandature départementale, celui qui présidera cette assemblée constituée de 34 conseillers élus au sein des 17 cantons du département ne s’appellera pas Maurice Chabert. Le président sortant LR a en effet décidé qu’il était temps, pour lui, de prendre une retraite bien méritée après 27 ans de bons et loyaux services au sein de l’hémicycle départemental, clôturés en beauté par 6 ans d’une présidence gagnée, il est vrai, au bénéfice de l’âge (il venait de fêter ses 71 ans).

Pour le reste, comme pronostiquer une majorité aux lignes parfaitement définies en Vaucluse, il faudrait être sacrément visionnaire. D’abord parce qu’ici, les grands courants politiques se répartissent à peu près équitablement. Mais aussi parce que, cette fois, aucun des camps en présence ne partira au combat parfaitement soudé.

Bien sûr, la droite classique marchera sous une bannière unique, mais elle sera soit concurrencée par des candidats de droite indépendante (comme dans le canton d’Avignon 2 ou celui d’Apt), soit par des transfuges de l’ex-UMP devenus macronistes. On ajoutera qu’à cause d’une bourde au moment des inscriptions en préfecture, un binôme LR a tout simplement été retoqué. Si bien que la droite classique ne sera présente que dans 16 des 17 cantons vauclusiens.

À gauche, ce n’est pas mieux. Alors que PS, écolos de toutes obédiences, PCF, LFI, PRG… annonçaient, photo de famille à l’appui, une alliance indéfectible, la toujours socialiste maire d’Avignon Cécile Helle a placé des binômes purs "majorité municipale" dans deux des trois cantons de sa ville qui étaient déjà tenus par la gauche.

Enfin, le RN vauclusien, désormais mâtiné de Droite populaire, se retrouve, comme son prédécesseur FN, à devoir compter avec les troupes de ligueurs (Ligue du Sud) du maire d’Orange qui lui bloquent toute forme d’expansion vers le nord du département.

Bref, bien malin qui saurait dire qui sortira franchement en tête, lors de ce cru 2021 d’une élection départementale où toute majorité absolue relève, en Vaucluse, de l’inaccessible.

Jacques Boudon

L'assemblée actuelle

Alpes-de-Haute-Provence : la campagne est ouverte

Cette fois, c’est parti ! Après la divulgation des candidats et de leurs suppléants le 5 mai dernier, la campagne pour les élections départementales, qui se dérouleront les dimanches 20 et 27 juin, a commencé

Cinquante-six binômes, soit cent douze candidats, sont en lice. Tout l’échiquier politique des Alpes-de-Haute-Provence est représenté. Alors que l’on craint une faible participation, les électeurs, qui sont amenés à voter le même jour pour les conseillers régionaux, ont donc le choix.

Autour des Républicains et de l’UDI, la droite, qui n’a pas scellé d’accord avec La République en marche, présente des candidats sur 14 cantons. Affichant un conglomérat de communistes, d’insoumis, de socialistes et d’écologistes, la "vraie gauche" comme elle se définit, sera elle aussi représentée sur 14 cantons. Ce sont les deux forces qui ont réussi à se déployer le plus largement.

Entre les deux blocs, La République en marche emmenée par ses chefs de file Benoît Gauvan et Sandrine Cosserat, les proches de René Massette et les soutiens de Jean-Yves Roux, qui se revendiquent également de la gauche - de gouvernance, elle - se sont organisés pour occuper le terrain dans l’espoir de remporter quelques cantons en vue de négociations futures.

Le Rassemblement national et Debout la France font de la figuration sur ce scrutin. Vers où iront leurs électeurs traditionnels? C’est l’un des enjeux de ce rendez-vous qui accouchera d’une nouvelle majorité au Conseil départemental pour les sept prochaines années.

Ivan Bonnet

L'assemblée actuelle